La grève suspect

Rodan lis le journal du matin, en marchant dans la rue, jusqu'au moment où un vieux le bouscule.

Rodan : - "Hé ! Connard ! Tu peux pas faire gaffe ?!" cria le petit journaliste.

Puis, en relisant son journal, il s'aperçoit qu'une nouvel grève à commencé dans la zone industrielle, mais que cette fois, ce n'était pas que pour une histoire de salaire, mais aussi des d'arnaques, de parachutes dorées et d'obscures rumeurs.

Rodan courra au plus vite vers la zone industrielle. Et à son habitude, il prend quelques notes et fait quelques croquis de la grève, avant de rentrer dans l'entreprise par une fenêtre à l'arrière avec discrétion. Il avance silencieusement, dans de sombres couloirs, avant de s'arrêter à côté du porte où il entend des voix.

Inconnu 1 : - "Mais je vous dis qu'on aura des problèmes avec la police et le maire.
Inconnu 2 : - Le plan est parfait. Il n'y a pas de problèmes.
Inconnu 3 : - De toute façon, il n'y aura plus de maire.
Inconnu 2 : - Après le maire populaire, la merde pour le peuple et l'argent pour nous.
Les inconnus : - AHAHAHAH !"

Rodan se rend compte qu'une sombre conspiration se prépare, et que cela est bien pire que ce qu'il pensait, pire qu'une histoire simple de pot de vin ou de fermeture d'entreprise. Il prend qu'en même note de la discussion des inconnus, déjà forts suspects.

Ce matin à l'imprimerie de la Gazette, les employés relient les dernières piles d'exemplaires du journal d'aujourd'hui. Le livreur vient charger son chariot pour les distribuer aux alentours de la ville. Elke Von Schwarzwald est dans son bureau, en train de griffonner un brouillon sur un fait divers qu'on lui a transmis. Elle s'accorda une pause café lorsque son supérieur vint l'interrompre.

"Elke, on ferme boutique aujourd'hui, suite à la grève qui a lieu en ce moment à la zone industrielle. Toute l'équipe s'y rend, les journalistes pour dégoter des informations et ceux qui viennent en soutien aux grévistes. Tu as le choix de retourner chez toi ou de nous accompagner. Sache que dans tous les cas l'on reprend en fin d'après-midi vers seize heures."

La rédactrice boucla ses affaires, un peu déboussolée d'avoir été coupée dans son élan, puis prit la décision de se diriger vers la zone industrielle. Sa collègue la rattrapa en courant puis l'accompagna.

"Mon mari s'y trouve, lui dit celle-ci. Les forces de l'ordre menacent d'intervenir très bientôt."
"C'est l'occasion de les soutenir et d'écouter ce qu'ils ont à dire, lui répondit Elke. Et assister au mouvement nous permettra sans doute d'avoir des formules écrites moins interprétées de la part des journalistes, et plus proches de ce qui se passe."

Elles arrivèrent, après un bon quart d'heure de route, sur les lieux. La collègue d'Elke aperçu son mari au loin et se précipita dans ses bras. La rédactrice continua son chemin, puis s'arrêta devant une entreprise, où se trouvait un syndicat. Elle décida alors d'engager la conversation avec ses membres.

Rodan arriva enfin devant l'entreprise après avoir écouté la petite discussion des inconnus. Il découvre que le nombre de grévistes avait augmenté, et qu'il y avait en plus des journalistes en assez grand nombre. Il continua à prendre quelques notes et croquis de la gréve en elle-même.

Rodan : - "Et bin, sacrée histoire.
Journaliste : - Sacré quoi ?
Rodan : - Rien rien. J'disais juste que c'est une sacrée gréve.
Journaliste : - Ouais, c'est bien parti pour être la plus grosse gréve de l'année.
Rodan : - Sans déconné ... dit-il en pensant aux inconnus.
Journaliste : - Enfin, attendons la police. Apparemment ils viennent pour les faire partir."

Rodan pensa qu'il serait judicieux de prendre quelques informations supplémentaires avant l'arrivée des policiers.

Après avoir longuement débattu avec les syndicalistes, Elke tenta de se frayer un chemin parmi la foule de journalistes qui stagnaient devant l'entreprise.

"Excusez-moi, vous pouvez vous poussez, s'il vous plaît ? J'aimerais passer..." demanda timidement la rédactrice.

Voyant qu'aucun des journalistes ne cédèrent à sa courtoise demande, Elke tenta de foncer dans le tas, bien déterminée à sortir de ce bourbier.

"EST-CE QUE VOUS POUVEZ VOUS BOUGER ?! J'AIMERAIS BIEN RESPIRER ! s'énerva t-elle. ET MES PIEDS, C'EST PAS UN BOULEVARD, FIÉFFÉ CRÉTIN !"

Quelques-uns libérèrent un peu le passage. Remontée et tendue, Elke bouscula brutalement un journaliste de petite taille qui manqua de tomber. Elle reprit alors ses esprits...

"Oh ! Mille excuses, monsieur..." rougit-elle, penaude...

- "Et bin, c'est ma journée pour les bousculades" dit Rodan en ramassant son petit carnet tombé au sol, puis le nettoies un peu de la poussière et de la terre. Il sort de sa poche un paquet de cigarillos, en prend un et le met à la bouche.
- "Qu'est-ce qui vous prend de pousser les gens comme ça ? C'est-une gréve ici, pas les soldes. Au fait, vous faites partie des grévistes ? Moi, c'est Otto, Rodan Otto, journaliste spécialisé dans les fait divers, les arnaques, les meutres et autres histoires pas nettes."
Il alluma son cigarillo, tout en ouvrant son carnet.

Elke eut un rire gêné et se gratta la nuque. Elle tendit sa main au journaliste.

"Je vous présente mes plates excuses, et me présente : Elke Von Schwarzwald, rédactrice à la Gazette d'Ashwood. L'imprimerie a fermé ses portes tout à l'heure, pour venir en aide aux grévistes, et nos journalistes pour recueillir quelques informations sur le mouvement. Moi je viens pour écouter les manifestants, et par la même occasion en savoir un peu plus afin d'obtenir plus de détails pour rédiger mes futurs articles... Vous travaillez pour quel journal ?"

Il semblait soudainement y avoir du mouvement chez les journalistes. Seulement, Elke ne pouvait apercevoir ce qui se passait devant l'entreprise, la foule était trop nombreuse.

- "Je suis d'une des gazettes de Londres, et j'ai été envoyé ici par mon rédacteur pour voir les évolutions dans cette ville, ses faits divers et autres."

Rodan essaye de voir ce qui se passe à l'entrée de l'entreprise en se mettant sur la pointe de ses pieds, pieds en sautillant.

- "C'n'est pas les directeurs de l'entreprise qui sortent ? Avec un tel raffut, ça ne m'étonnerais pas. Bon, j'vais me faufiler vers eux, j'reviens.

Rodan essaye de se frayer un chemin parmi la foule et ses cris, et atteins enfin un trio d'hommes, bien habillés. Rodan leur pose une question :
- "Messieurs, qu'allez-vous faire de l'entreprise.
- Je n'ai pas à vous répondre ! dit l'un d'eux.
- Non d'un carnet rouillé ... se dit le petit journaliste. C'est l'un des troufions du complot."

Rodan reste ahuri en les voyant partir sous les cris et les insultes. Puis, il commence à dessiner les portraits du futur trio infernal.

- "J'ai enfin les tronches. Il ne manque plus qu'a connaitre un peu plus sur leur plan."

C'était le jour où Karl allait faire ses courses. Karl n'aimait pas ce jour. Depuis tout petit, alors que ses parents vivaient dans une zone rurale, sortir n'avait jamais été son truc. Alors vous imaginez? Une foule de sombres crétins, inférieurs en esprit, aux bas intérêts, marchant vers l'abattoir laborieux qu'est leur travail... Triste monde, pensa-t-il pour la cinquième fois dans la journée, en levant les yeux au ciel. Ce monde, il ne l'aimait pas. Surpeuplé, et d'après les récentes enquêtes de la gazette, la population augmentait de plus en plus vite. Il avait d'ailleurs fait un rapide calcul en se basant sur ces vagues prédictions. Vers l'an Deux-Mil, la population terrestre devrait atteindre les sept milliards. Sept milliards de bœufs ordinaires, alcooliques et sales, et cela grimperait encore, suivant une trajectoire exponentielle.

"Bah, au moins, je ne suis pas né aux deuxième millénaire..." Pensa-t-il tout haut, comme souvent.

En débouchant dans une rue, perdu dans ses funestes pensées, il heurta une personne, s'excusa sèchement, avant de heurter dans un autre personne, presque un pas plus tard. Énervé, il leva les yeux, s’apprêtant à jurer contre l'impolitesse des gens qui bousculent les humbles quidams dans une rue toujours déserte, pour se rendre compte qu'un énorme attroupement de personnes bloquaient la rue. Il serra les dents pour s'empêcher de hurler, ferma les yeux et fit demi tour brusquement, entrant en collision avec celle qu'il décrira plus tard dans son compte rendu personnel comme "Une sorte de sirène* molle et visqueuse.".

"Sale journée!", déclara-t-il fulminant.

*La sirène est un ancien nom du lamantin.

"N'est-ce pas... lui répondit Elke, qui tentait de faire le tour de la foule pour voir ce qu'il se passait devant l'entreprise. L'homme chétif à qui elle s'était adressée semblait aussi énervé qu'elle.

Montée sur une espèce de tertre, elle se rendit alors compte de la masse de personnes qui composaient cette scène digne d'un scénario apocalyptique... Des cris, des bousculades, des objets volants identifiables... Elle aperçu sa collègue, en pleurs dans les bras de son mari, qui lui, haussait le poing en postillonnant sa colère, puis des membres de son équipe, l'un des imprimeurs qui semblait perdu et chercher ses lorgnons, et ces stupides journalistes vaniteux qui ignoraient son existence à la rédaction, qui grattaient sur leur calepins avec la rapidité d'une machine à coudre sans se soucier du réel problème...
Elke se dit qu'elle était plutôt bien installée sur son monticule, à observer ces individus dignes d'une fourmilière en révolte.

"Tss... Ces enfoirés n'ont même pas dit un mot... murmura t-elle entre ses dents, pensant aux patrons de l'entreprise. Ils doivent quand même avoir les genoux qui tremblent sous cette masse d'indignés..."

Puis, se rappelant qu'il y avait du boulot qui l'attendait cette après-midi, elle consulta sa montre à gousset... Constatant qu'elle avait encore du temps devant elle.

Karl observa la femme montée sur le tertre. Drôle de spécimen. Une constitution osseuse inhabituelle et un crâne étrange. Décidément, sa curiosité scientifique le poussait à surmonter son dégoût pour les masses pour l'étudier de plus près. Quitte à finir roué de coups après quelques questions étranges et son air de pervers... Bref, ça valait le coup.
Il suivit donc cette étrange créature et l'observa tirer sa montre à gousset. Grands Dieux, quelles cernes! Elles étaient encore plus présentes que les siennes. Et quel traumatisme de son enfance l'avait poussée à porter ces ornements capillaires? Non, à regarder de plus près, c'étaient bien ses cheveux, emmêlés en sortes de longs boudins... Ce n'était pas dû à un manque de soin, c'était trop régulier...
Il prit son courage à deux mains et affronta sa haine de toute interaction sociale pour lui poser une question. Mais même lui en savait assez pour ne pas poser des questions trop directement, aussi il commença par un simple:

"Vous êtes?"

Elke ne remarqua pas la présence de l'homme menu qui s'adressait à elle. D'ailleurs, elle avait complètement oublié son existence en une fraction de secondes, après lui avoir répondu spontanément. Elle semblait concentrée à observer la foule, puis aperçu le journaliste de petite taille qu'elle avait rencontré auparavant, qui semblait gribouiller sur son carnet...

Elke se décida à rentrer chez elle, histoire de siroter un thé pour se détendre après toute cette pression médiatique à laquelle elle avait assisté. Perdue dans ses pensées, regardant ses pieds, elle heurta le petit individu blond à lunettes qui semblait attendre une réponse.
Surprise de le voir ici, et surtout impressionnée par sa dégaine inaccoutumée, ses habits moulants épousant son corps gringalet et son regard incongru auxquels elle n'avait pas immédiatement fait attention lorsqu'elle lui a adressé la parole, elle resta impuissante face à sa présence. Elle prit un certain moment pour observer son visage constitué de cernes et de pâleur dominantes, puis se rendit compte que ça n'était pas des plus grandes politesses que de reluquer un énergumène pareil, tel qu'il soit. Sans avoir conscience de l'énième maladresse qu'elle allait faire, elle lui posa mots pour mots la même question :

"Vous êtes ?"

*D'accord. Soit elle a un grave problème d'attention, soit elle a un Trouble Obsessionnel Compulsif qui la pousse à répéter les questions qui lui sont posées. J'opterais pour la deuxième proposition, elle me semble plus probable. Elle ne devrait donc pas tarder à répondre.*

Ainsi, il attendit pendant presque une minute sans piper mot, ses sourcils se fronçant petit à petit. Voyant qu'elle ne répondait pas, et même qu'elle semblait attendre quelque chose de lui, il laissa sa machine cervicale tourner, en regardant dans le vide. Elle était étrange. Très étrange. Physiquement, mais surtout mentalement. Qui était-elle? Pourquoi? Quelle réponse attendait-elle? Et surtout, pourquoi lui avait-il même adressé la parole? Il n'aurait jamais du sortir, jamais du s'attarder, maintenant, il y était jusqu'au coup.
Il choisit donc de répondre à sa question d'une manière qui lui assurait de ne pas se tromper dans son raisonnement.

"Pardon?"

Il y eut comme un vide sidéral dans la cervelle d'Elke... Un grand silence gênant régna, puis la jeune femme se remit en question.

"Où suis-je ? A qui m'adresse-je ? Dans quel état j'ère ?" se demanda t-elle. Les rouages qui faisaient tourner la capacité intellectuelle d'Elke dans son crâne commençaient à fumer. Elle se pinça le haut du nez en fermant les yeux et tentait de reprendre ses esprits. Elle se demanda si elle n'avait pas posé une question qui fâche, ou si elle ne s'adressait pas à une personne de la plus haute importance et qu'elle avait posé sa curieuse question avec affront.

"Je vous demande pardon si je vous ai offensé," lui lâcha t-elle. Puis elle se dit qu'au final, peut-être que ce personnage était un peu sourd.

"Euh... Je... bredouilla t-elle, complètement désemparée. Engager une conversation avec un inconnu, et aussi biscornu que celui-ci paraissait être, n'était pas dans ses habitudes. Elle reprit, en lui tendant sa main : Permettez-moi de me présenter. Elke Von Schwarzwald, rédactrice de la Gazette dans la rubrique Faits Divers. Vous êtes ?"

Rodan arriva enfin vers Elke après avoir gribouillé la foule dans son carnet.

- "Eh, bah dit ..." dit-il d'un air étonné en voyant la journaliste et le drôle d'énergumène en habilles moulants.

Il jette sa fin de cigarillo par terre, l'écrase, et en sort un nouveau et l'allume. Il ferme son carnet et le range dans sa veste.

- "J'ai loupé une séquence ou quoi ? dit Rodan avec ironie. Bonjour M'sieur. Je suis Rodan Otto, journaliste d'une gazette londonienne, et je suis spécialisé dans les faits divers, les arnaques, les meurtres et autres complots. Et vous ? Vous faites quoi ?"

Il se penche vers Elke, et lui dit discrètement :

- "Il a l'air bizarre. On dirait un de ces savants fous et solitaires."

Décidément, elle était vraiment paumée. Et elle était journaliste. Un métier de chacals qui tournent autour des histoires des foules pour faire de l'argent. De la pseudo-information, en plus. Et elle semblait même de la pire espèce: les Faits Divers. Histoires morbides et tirées par les cheveux. Cependant, d'un point de vue anthropologique et psychologique, elle valait le coup d’œil. Et voilà qu'en arrivait un autre. Encore plus enfoncé dans la sordidité. Il évalua le nouvel arrivant.
Selon des critères normaux, Rodan avait l'air sympathique. L'un de ces solides gaillards qui ne parlaient pas très souvent, mais qui le faisaient avec sagesse. Mais Karl ne intéressait qu'à sa structure corporelle. Petit et solide. Un rare specimen.
Il décida donc de ranger ses rancœurs et de se présenter.

"Karl Olsfer, répondit-il en esquissant une demie-révérence d'un mouvement gauche et ridicule. Docteur ès Physique, Biologie, Chimie Organique et Minérale, Anthropologie... Bref, Docteur ès Sciences. Découvreur et Inventeur, en somme. Qu'est-ce qui vous attire dans cette foule de crétins bruyants?"

Il se rendit compte que sa rancœur n'était pas partie bien loin.

- "Je savais que vous étiez scientifique dit le petit journaliste en souriant. Pour ma part, je suis ici pour prendre quelques informations et faire des croquis sur la grève. Et si on cherche bien, c'est loin d'être tout. Il y a des trucs bien suspects autour de l'entreprise, et un évènement va se produire dans la ville."

Rodan se dit qu'il en a un peu trop dit à ses inconnus. Surtout que la journaliste risque de piquer le sujet et de le publier avant lui. Il sa gratte la tête, sort son carnet, et écrit quelques petites phrase, comme "éviter de trop parler au inconnus sur des sujets sensible".

"Des trucs bien suspects? Un évènement? Je le déteste déjà cet évènement, répondit Karl, l'air las. Je déteste que mon quotidien soit bouleversé. Je hais l’imprévu. Déjà, je marchais tranquillement pour acheter des provisions quand cette foule m'a littéralement piétiné."

Il regarda dans le vide en se répétant des pensées lasses et fatiguées, quand il reprit ses esprits et demanda de but en blanc:

"Vous me laisseriez vous examiner?"

Elke, ayant l'oeil furtif, pu distinguer ce qu'avait écrit le journaliste sur son carnet :

"... nains cons nus sur sachets fusibles..."

Elle se demanda décidément sur quels genres de spécimens elle était tombée. Essayant en vain de trouver un rapport avec ce qu'avait écrit le journaliste et les évènements qui avaient lieu, elle décida de prendre le culot de demander directement à celui-ci :

"Mais, dites-moi, cher Monsieur... Qu'entendez-vous par... "trucs bien suspects autour de l'entreprise" ? D'où avez-vous obtenu ces informations ?"

En attendant sa réponse, elle en profita pour scruter les moindres détails que pouvait avoir le scientifique sur lui, en essayant d'être la plus discrète possible.

- "M'examiner ?! pourquoi ?!" dit le journaliste avec surprise et une pointe de peur. Il se demandait si c'était juste quelques tests comme chez un médecin, ou plutôt une expérience biologique sur son cerveau.

- "Bon, heu ... dit-il en reprenant ses esprit. Pour en revenir au sujet suspect, j'ai une bonne expérience pour trouver des informations. On peut dire que je suis quelqu'un de très discret, surtout en mission journalistique. Bref, pour faire simple, il y a une histoire de complot de la part de la direction de cette entreprise. C'est sûrement en partie à cause de ça que les travailleurs sont en grèves. Certains, surtout les syndicalistes, ont dû entendre des rumeurs sur cette histoire. Donc il faudra en questionner quelques-uns.

Comme à son habitude, Rodan se rend encore compte qu'il en a dit trop.

Examinant l'examinateur examiner l'examiné, Elke s'adressa à Rodan en riant :

"Vous en savez des choses, on dirait !"

Puis, s'étant rendu compte qu'elle avait créé un bide total, elle tenta de détendre l'atmosphère en changeant de sujet.

"Hum... A mon avis, il va falloir attendre longtemps avant de pouvoir attendre les manifestants et les syndicalistes. Les journalistes se sont précipités sur eux tels des charognards, les pauvres..."

Et encore une maladresse de la part d'Elke, qui semblait avoir déjà oublié que Rodan était un journaliste. Roulements de tambours. La rédactrice [HRP : Oui, car je ne suis pas réellement une journaliste, moi ] reprit :

"Hem... Heu... Où pensez-vous que les patrons se planquent ? Ils doivent bien flipper, à l'heure qu'il est ! Haha, haha, ha..."

- "Il aurait fallu les suivre quand ils viennent de sortir de l'entreprise. Mais on peut les rattraper si on cours maintenant là-bas. Mais faut faire gaffe avec ce genre de patrons. Ils sont limite paranoïaque dans ce genre de situation. Et j'y connais un rayon de ces patrons."

Rodan se met à rire, mais voit qu'il fait lui aussi un bide total. IL crapota un peu son cigarillo avant de reprendre.

- "Vous savez, on peut toujours "s'associer" pour cette mission journalistique. C'est le genre de chose où il être solidaire et en équipe pour bien gérer la situation. Qu'en pensez mes chers camarades."

Il entendit de nouveau des cries du côté des grévistes. Il commença à sautiller pour voir un peu ce qui se passe.

- "Tiens, il se passe quoi encore ?"

Karl les avait regardé échanger ces quelques mots, portant un doigt sur son menton, et réfléchissait. S'associer avec eux? Rempli de désagréments, mais cela pourrait être une façon d'augmenter ses compétences en intelligence sociale, une des seules intelligences dont il est plutôt dépourvu. Et il devait avouer que les paroles de l'étrange petit journaliste l'intriguaient. Alors, pour la première fois de sa vie, il décida de prendre une décision insensée.

"Je marche." Lança-t-il d'un air lugubre, esquissant un sourire carnassier.

- "CA, c'est cool ! cria Rodan. Votre intelligence sur la science en général, en plus des éventuelles inventions utiles, plus ma capacité en discrétion dans les recherches d'informations, ce sera excellent" dit le journaliste, déjà enthousiaste.

- "Et vous, madame Elke ? Etes-vous de la partie ? s'exprima Rodan. Je sens que de grandes choses vont se passer. Une belle aventure bien sombre, comme je les aime."

Il prit encore un énième cigarillo, et l'alluma avec une allumette.

- "Heu ... Vous voulez un cigarillo ?"

"Sans façon," lui répondit Elke, qui elle sortit une cigarette, et attendait que Rodan lui allume.

Un silence régnait, une fois de plus. Elke réfléchit sur une éventuelle énième bourde qu'elle aurait pu faire, puis se remémora la question du journaliste.

"Ha ! Je disais "sans façon" pour le cigarillo, bien entendu ! s'amusa t-elle. Mais, vous savez, je n'ai pas vraiment l'âme d'une grande aventurière. Cela dit, je veux bien que l'on se serre les coudes pour savoir ce qui se passe du côté de la direction de l'entreprise. Pour ce qui est de courir, ça va être difficile, je m'essouffle facilement..."

Voyant que ses interlocuteurs passaient outre à ses soucis de santé, elle prit spontanément la décision de les suivre dans leur démarche.

"C'est d'accord, déclara t-elle en remontant sur sa butte d'observation. Ça semble s'agiter, là-bas. On devrait peut-être intervenir avant qu'il ne soit trop tard..."

"Pour ma part, je préfèrerais rester simple observateur. Je n'aime pas le contact, ni les foules. Et des esprits échauffés ont tendance à déclamer plus facilement leurs idées. Cependant, je vous laisse décider."

Il s'alluma une cigarette un peu rustique avec un petit briquet cuivré et sale, produisant une flamme des plus impressionnantes, puis s'avança légèrement dans une petit nuage de fumée.